Prise de décision

Nous prenons plusieurs milliers de décisions par jour, un grand nombre d’entre elles de manière automatique et inconsciente ou peu consciente. Comme mettre des lunettes, marcher, respirer…

Que se passe-t-il dans notre cerveau dans le processus de prise de décision ?
Comment se passent nos prises de décision ?
Qu’est-ce qui fait que nos émotions influent sur nos décisions ?
Comment notre capacité de réflexion influe-t-elle ?

Ce schéma résume les deux circuits principaux de la prise de décision, menant à l’action :

Deux voies différentes nous amènent à prendre des décisions et à passer à l’action.

La première voie, rapide, appelée système 1, et celle qui s’appuie principalement sur nos émotions. Celle-ci court-circuite le traitement de l’information, la réflexion et l’analyse, compare rapidement la situation à nos souvenirs, et bascule sur une prise de décision.
La deuxième voie, appelée système 2, est plus lente -enfin c’est tout relatif puisqu’il s’agit de microsecondes !-. Elle s’appuie sur notre capacité d’analyse, de réflexion, de traitement de l’information, de discernement. Puis elle aboutit sur une prise de décision.

Chacun de ces systèmes, le système 1 « rapide », le système 2 « lent », a des avantages et des inconvénients.
Si le système 1, Automatique est particulièrement rapide et impulsif, il est tout à fait opérationnel dans les situations simples. Ses limites sont la précision et le niveau de conscience, qui constituent des handicaps dans les situations complexes.
Le système 2 ou Adaptatif ou encore Agile, lui est beaucoup plus précis, plus judicieux et plus conscient que le système un, ce qui lui confère de l’intérêt dans les situations complexes.

L’enjeu de la prise de décision n’est donc pas tellement de passer par l’un ou par l’autre, mais plutôt de savoir détecter quel système est utile à la situation que nous sommes en train de vivre. Et de choisi consciemment de basculer sur le système 2 si besoin. C’est ce que l’on nomme aussi prendre de la hauteur sur la situation.

Prononcez la couleur du mot ci-dessous :
Rouge
Vous venez de lire le mot, de manière automatique. Système 1.
Vert
Et là, que se passe-t-il ?
Votre Système 1 vous souffle « vert » et votre Système 2 inhibe cette première réponse, la corrige et prononce « bleu ». Le travail effectué par votre cerveau est de retenir la réponse automatique puisque vous avez appris à lire, et dans un second temps de décoder la couleur de la graphie et de prioriser cette réponse à la première, pour répondre à la consigne.

Gouvernances Cérébrales

Comment fonctionne notre cerveau ? Y a-t-il des modes de fonctionnements particuliers qui caractérisent nos comportements, ce que nous ressentons et ce que nous pensons ?

Entre deux personnes en train de rire, y a-t-il des similitudes de fonctionnement cérébral ?

Notre cerveau fonctionne en activant les connexions entre les neurones, qui transmettent des informations, à travers ce réseau très dense et complexe. Concrètement, de nombreuses informations sont transmises à différents endroits de notre cerveau.

On sait aujourd’hui que certains territoires sont spécialisés dans certaines fonctions, comme par exemple le fait de parler, ou encore d’avoir peur, de mémoriser, de jouer du violon, de chanter…

On sait également, que le cerveau est en évolution tout au long de la vie, on parle alors de plasticité cérébrale.

En même temps, ces territoires ne fonctionnent pas séparément, l’un après l’autre, ou comme des systèmes indépendants, côté à côte. Cela dit, lorsque nous avons peur par exemple, une zone du cerveau est plus particulièrement active. Et c’est la même zone pour deux individus différents qui ont peur, cela quelles que soient leur culture, langue ou origine. Pour caractériser ce fonctionnement, on parle de Gouvernance cérébrale.

Qu’est-ce que la Gouvernance ?

C’est un peu comme pour un orchestre de Jazz : les instrumentistes jouent tous ensemble un thème, au même rythme, sur la même harmonie.

A un moment, l’un des instruments démarre un solo. Par exemple le saxo. Alors souvent le saxophoniste se lève, et surtout on entend son instrument qui « passe au dessus » des autres. Les autres instruments continuent à jouer, à accompagner, et, en même temps, on entend plus particulièrement le saxo. Et à ce moment-là, c’est lui qui « mène la danse » : il choisit le tempo, il peut changer l’harmonie, voire même le thème, il réalise des improvisations et les autres lui emboitent le pas. C’est lui qui gouverne.

Puis, il reprend sa place et un peu plus tard, c’est le solo de la contrebasse, et ainsi de suite. Les gouvernances alternent.

Finalement pour notre cerveau, c’est un peu pareil.

A certains moments, nous ressentons de la peur par exemple, notre cerveau passe en gouvernance instinctive, et puis lorsque la situation a évolué, nous nous sentons détendus et pleins d’imagination. C’est une autre gouvernance qui est à l’oeuvre, dans cet exemple, la gouvernance adaptative.

L’Approche Neurocognitive et Comportementale développée par l’IME (Institut de Médecine Environnementale) distingue quatre type de gouvernances :

  1. La gouvernance instinctive qui régit les comportements, pensées et émotions liées à la survie de l’individu, elle est le siège du calme et des différentes formes de stress : fuite, lutte, inhibition.
  2. La gouvernance grégaire qui régit l’individu dans le groupe, elle est à l’origine de la façon dont nous prenons notre place dans un groupe, spontanément, par défaut.
  3. La gouvernance émotionnelle, sorte de disque dur de notre cerveau, elle est le siège de nos traits de personnalité, de nos valeurs, et de tout ce que nous mémorisons.
  4. La gouvernance adaptative, siège de notre intuition, de notre capacité d’innovation et de créativité. Comme une tour de contrôle, elle est vigilante en permanence.

Cela dit, notre cerveau présente une sorte d’hétérogénéité de fonctionnement : les gouvernances instinctive, grégaire et émotionnelle sont automatiques, c’est à dire qu’elles se déclenchent toutes seules.

Par exemple, quand nous sommes stressés, nous ne l’avons pas décidé, nous pouvons juste le constater.

La gouvernance adaptative, elle, n’est pas automatique.  Elle ne peut gouverner que si les autres gouvernances lui « passent la main ». Par exemple, si je suis stressée, alors je n’accède pas à mon intuition. je dois d’abord revenir au calme pour basculer.

Il nous faut ainsi apprendre à basculer consciemment du mode mental automatique au mode mental adaptatif. C’est aussi ce que l’on nomme la prise de recul.

Le Rapport de dynamique comportementale donne une indication de notre capacité à basculer en mode mental adaptatif.

Cette capacité se développe, d’une part par l’éducation, d’autre part via des exercices de coaching.

Neurosciences et plasticité cérébrale

Les neurosciences permettent aujourd’hui de visualiser la réalité qui se cache derrière les dictons et autres locutions anciennes telles que : « avoir la tête de l’emploi », ou « c’est une déformation professionnelle », ou encore « c’est en forgeant que l’on devient forgeron ».

Ainsi, chez le chauffeur de taxi, l’hippocampe spécialisé indispensable à l’orientation spatiale est particulièrement développé, chez le parfumeur, ce sont les aires olfactives, chez les musiciens la structure et le fonctionnement de multiples zones sont modifiées par la pratique, en fonction de l’instrument pratiqué, enfin, chez les traducteurs-interprètes certaines zones sont, elles, moins actives, ce qui facilite les mécanismes propres à ce métier.

Le phénomène de plasticité cérébrale est aujourd’hui visualisable : la multiplication des connexions neuronales peut aller jusqu’à un facteur de 1000 fois le nombre de connexions initiales, existantes avant la spécialisation.

L’hypothèse est posée que cette plasticité cérébrale pourrait changer la vision des carrières « non linéaires », montrant que plusieurs spécialisations successives sont tout à fait possibles, avec toutefois des questionnements quant aux capacités de plasticité de chaque cerveau, l’impact d’une spécialisation sur les autres territoires du cerveau, la durabilité de la plasticité tout au long de la vie, la pérennité des compétences, leurs renforcements mutuels…

En outre, il semblerait que chez les personnes à haut potentiel, notamment identifiés par un QI supérieur à 130, les régions du cerveau situées derrière le front se développeraient plus tôt, augmentant la vitesse des fonctions cognitives et les rendant plus efficaces. On mesure notamment par le test de QI une mémoire de travail importante. Les territoires pré-frontaux se développent de la petite enfance jusqu’à 25 ans environ. Ainsi, il semble que les personnes concernées aient dès l’adolescence une connectivité cérébrale accrue, vraisemblablement en lien avec une intelligence créative particulièrement développée.

A l’inverse, la consommation d’alcool ou de drogues provoque une perte de plasticité cérébrale
Au démarrage de la consommation de drogue, le cerveau apprend à « se sentir bien avec les drogues ». Cet apprentissage est possible grâce à des connexions neuronales efficaces. 
Cependant, toute consommation de drogue endommage les jonctions entre neurones et synapses. Or, elles sont essentielles pour qu’une intention soit convertie en action (la planification du changement est mise en oeuvre dans le cortex préfrontal). 
Ainsi, la consommation de drogue perturbe les capacités d’apprentissage, et donc empêche les personnes dépendantes d’arrêter de se droguer, soit encore d’apprendre à « se sentir bien sans drogue ». L’inversion d’apprentissage, c’est à dire passer de « se sentir bien avec drogue » à « se sentir bien sans drogue », gérée en mode automatique, devient alors quasi-impossible.  

Sources :
Sciences & Vie, numéro de décembre 2013, « A chaque métier son cerveau ».
Cerveau & Psycho de décembre 2013.