Notre cerveau nous sert aujourd’hui à des tâches qui n’existaient pas il y a 6000 ans, et aujourd’hui le cerveau d’un bébé est tel que celui d’un bébé il y a 6000 ans.
Pourtant le monde a évolué.
Beaucoup.
Alors comment fait notre cerveau pour s’adapter et innover face à des situations complexes ?
Selon Lionel Naccache, neurologue, spécialiste des neurosciences, les stratégies adaptatives du cerveau sont multiples : le recyclage neuronal, la plasticité cérébrale, la motivation, les croyances, les ingrédients de la prise de décision, la relativité, l’attention.
Selon l’Approche Neurocognitive et Comportementale développée par Jacques Fradin, l’innovation est sous-tendue par la gouvernance adaptative, dans laquelle les 6 étapes clefs sont la curiosité, l’acceptation, la nuance, la relativité, la réflexion logique, et l’opinion personnelle.
Alors, dans votre quotidien de direction d’entreprise, de manager ou de leader, comment identifiez-vous vos ressources face aux sujets complexes, qui nécessitent d’activer le « think out of the box », ou encore la créativité pour trouver des nouvelles solutions à des situations inédites ?
Quels moyens vous donnez-vous pour développer ces processus de créativité ?
Les points clefs de la conférence de Lionel Naccache sont :
le recyclage neuronal
Le cerveau utilise des zones non prévues initialement, à l’échelle du développement de l’espèce humaine, pour une nouvelle tâche. Par exemple la lecture : la zone qui est recyclée est celle de la vision qui reconnait un animal quel que soit l’angle de vue, et on entraine notre cerveau à distinguer les différences visuelles, comme b et d ; autre exemple : le vocabulaire de la douleur corporelle est recyclée pour décrire l’exclusion sociale ‘j’ai été touchée, ça m’a fait mal que tu me rejètes…’
la plasticité cérébrale
Le cerveau développe une zone pour une tâche particulière. Par exemple, le cerveau des taxis qui développe beaucoup plus la zone qui sert au repérage spacial, ce qui a été démontré par une étude, avant l’usage des GPS 😉
la motivation
Ce qui fait agir -se mettre en mouvement-, voire se dépasser, via le neurotransmetteur la dopamine
les croyances
L’effet placébo a des effets qui vont dans le sens des croyances de l’individu, sans principe actif.
la prise de décision
Damasio, dans « L’erreur de Descartes », montre que la prise de décision est soutenue par l’analyse rationnelle ET un fonctionnement émotionnel équilibré. S’il manque l’un de deux, la prise de décision complexe est altérée.
la relativité
La perception du monde est une construction, ainsi voir différemment change le monde. Par exemple, la rétine comporte cônes au centre et bâtonnets en périphérie et seuls les cônes captent la couleur. Or nous voyons en couleur tout le champ visuel. Le reste est créé par notre cerveau
l’attention
Dans une expérience, deux équipes habillées en blanc et en noir se font des passes de ballon. Si on compte les passes de l’équipe blanche, le cerveau occulte le reste. Le cerveau est focalisé sur l’équipe blanche.
Ainsi, le « think out of the box » est une façon de jouer sur notre compréhension du problème et notre perception de la réalité, pour imaginer autre chose.
Enfin, le sens est subjectif, et le cerveau crée une histoire pour justifier une prise de décision a postériori.
Les recherches sur l’innovation et la créativité ont identifié 4 étapes :
- phase de préparation avec un focus de l’attention et de la conscience
- phase d’incubation : on arrête de réfléchir, on passe à autre chose, on va marcher, dormir… c’est une période non consciente, non focalisée sur l’innovation
- phase d’illumination : prise de conscience du produit de la phase 2, guidée par la phase 1
- phase de vérification : où on éprouve ce qui a été trouvé
Sources :
Thinking fast and slow Daniel Kahneman
L’Approche Neurocognitive et Comportementale – Jacques Fradin